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UN PORTRAIT DE FEMME.

lumière éclairait vivement par transparence son abondante et noire chevelure.

Tout à coup, Karl Dragoch fut frappé par une particularité des plus singulières. Si Ilia Brusch était brun, et cela n’était pas contestable, il ne l’était du moins que partiellement. Noirs à leur extrémité, ses cheveux, à leur base, s’accusaient, sur une longueur de quelques millimètres, du plus indéniable blond.

Phénomène naturel que cette diversité de teintes ? Peut-être. Mais, plus vraisemblablement, simple résultat d’une vulgaire teinture dont on aurait négligé de renouveler l’application.

Quand bien même un doute aurait pu, d’ailleurs, subsister à ce sujet dans l’esprit de Karl Dragoch, celui-ci n’eût pas tardé à être exactement renseigné, puisque, dès le lendemain matin, les cheveux d’Ilia Brusch avaient perdu leur double coloration. Le pêcheur, évidemment, s’était aperçu de sa négligence et y avait remédié pendant la nuit.

Ces yeux que leur propriétaire dissimulait avec tant de soin derrière d’impénétrables verres, ce mensonge certain au moment de l’escale à Vienne, cette hâte incompréhensible si peu compatible avec le but avoué du voyage, ces cheveux blonds transformés en cheveux noirs, tout cela formait un faisceau de présomptions dont on devait nécessairement conclure… Au fait, que devait-on en conclure ? Karl Dra-