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PRISONNIER.

ses muscles. C’est elle qui lui avait donné, au départ de Gran, la force de résister à la tempête et de lutter victorieusement contre le vent déchaîné. C’est elle qui lui faisait hâter le pas, tandis qu’il revenait vers la barge, muni du cordial destiné à M. Jaeger.

Sa surprise fut grande de n’y pas trouver le passager qu’il avait quitté si mal en point, et le petit mot d’avertissement écrit par celui-ci ne la diminua pas. Quel motif si impérieux avait pu décider M. Jaeger à s’éloigner malgré son état de faiblesse ? Comment pouvait-il se faire qu’un bourgeois de Vienne eût des affaires si pressantes en rase campagne, loin de tout centre habité ? Il y avait là un problème dont les réflexions du pilote ne rendirent pas la solution plus prochaine.

Quelle qu’en fût la cause, l’absence de M. Jaeger avait, en tous cas, le grave inconvénient d’allonger encore un voyage déjà trop long. Sans cet incident inattendu, la barge aurait vite gagné le milieu du fleuve, et, avant le soir, beaucoup de kilomètres eussent été ajoutés aux kilomètres laissés jusqu’ici dans son sillage.

La tentation était bien forte de tenir pour nulle et non avenue la prière de M. Jaeger, de pousser au large, et de continuer sans perdre une minute un voyage dont le but attirait Serge Ladko comme l’aimant attire le fer.

Le pilote se résigna pourtant à l’attente.