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LE PILOTE DU DANUBE.

au bourg de Karlovitz, situé une vingtaine de kilomètres en aval. Sur son ordre, le chaland n’avait fait halte que deux ou trois lieues plus bas, pour attendre son capitaine, qui le rejoindrait en s’aidant du courant.

Vers neuf heures du soir, celui-ci n’en était plus fort éloigné. Il ne se pressait pas. Laissant fuir la barge au gré du courant, il s’abandonnait à des pensées en somme assez riantes. Son stratagème avait pleinement réussi. Personne ne l’avait suspecté et rien ne s’était opposé à ce qu’il se renseignât librement. À vrai dire, de renseignements, il n’en avait guère récolté. Mais cette ignorance publique, qui confinait à l’indifférence, était, en somme, un symptôme favorable. Bien certainement, dans cette région, on n’avait que très vaguement entendu parler de la bande du Danube, et l’on ignorait jusqu’à l’existence de Karl Dragoch, dont la disparition ne pouvait, par suite, causer d’émotion.

D’un autre côté, que ce fût à cause de la suppression de son chef ou en raison de la pauvreté de la région traversée, la vigilance de la police paraissait grandement diminuée. Depuis plusieurs jours, Striga n’avait aperçu personne qui eût la tournure d’un agent, et nul ne parlait de la surveillance fluviale si active deux ou trois cents kilomètres en amont.

Il y avait donc toutes chances pour que le chaland arrivât heureusement au terme de