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LA MAISON VIDE.

raies de lumière filtrant à travers les volets d’une fenêtre et striant la chaussée. Dragoch se hâta vers cette fenêtre. Par une fente des volets, Titcha et lui regardèrent dans la maison.

Ils aperçurent une salle de proportions modestes, mais assez confortablement meublée. Le désordre des meubles et la couche épaisse de poussière qui les recouvrait incitaient à croire que cette salle avait été le théâtre, depuis longtemps abandonné, de quelque scène de violence. Le centre en était occupé par une grande table, sur laquelle était accoudé un homme, qui semblait réfléchir profondément. La contraction de ses doigts à demi disparus dans les cheveux en désordre exprimait éloquemment le trouble douloureux de son âme. Des yeux de cet homme, de grosses larmes coulaient.

Ainsi qu’il s’y attendait, Karl Dragoch reconnut son compagnon de voyage. Mais il ne fut pas seul à reconnaître le désespéré songeur.

— C’est lui !… murmura Titcha en faisant d’énergiques efforts pour chasser son ivresse.

— Lui ?…

— Ladko.

Titcha se passa la main sur le visage et parvint à retrouver un peu de sang-froid.

— Il n’est pas mort, la canaille… dit-il entre ses dents. Mais il n’en vaut guère mieux… Les Turcs me payeront sa peau