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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

gazette ?… Elle est tombée près de vous… Mon père, c’est l’heure où, d’habitude, je vous embrasse… Pourquoi, Haralan, me regarder avec des yeux si tristes ?… Je t’assure que je suis toute souriante. Pourquoi te faire de la peine ?… Et vous, mon cher Marc, voici mes deux mains… Prenez-les !… Voulez-vous venir au jardin ?… Donnez-moi votre bras, Henri, et nous causerons de mille et mille choses. ».

L’adorable et bonne créature n’avait pas voulu qu’il fût apporté aucun changement à la vie de famille. Elle et Marc passaient de longues heures ensemble. Elle ne cessait de lui murmurer d’encourageantes paroles. Elle essayait de le consoler, affirmant qu’elle avait confiance dans l’avenir, que cette invisibilité cesserait un jour… Cet espoir, l’avait-elle réellement ?

Une modification, cependant, une seule, fut faite à notre vie familiale. Myra, comprenant combien sa présence dans ces conditions eût été pénible, ne vint plus prendre sa place à table au milieu de nous. Mais, le repas achevé, elle redescendait au salon. On l’entendait ouvrir et refermer la porte, disant : « Me voici, mes amis, je suis là ! » et elle ne nous quittait plus qu’à l’heure de remonter dans sa chambre, après nous avoir souhaité le bonsoir.

Il n’est pas besoin de le dire, si la disparition de Myra Roderich avait produit tant d’effet dans la ville, sa réapparition — je n’ai pas d’autre mot dans mon vocabulaire — en produisit plus encore. De toutes parts arrivèrent des témoignages de la plus vive sympathie, et les visites affluèrent à l’hôtel.

Myra avait renoncé à toute promenade à pied dans les rues de Ragz. Elle ne sortait qu’en voiture fermée, accompagnée de quelqu’un des siens. Mais elle préférait à tout s’asseoir dans le jardin, au milieu de ceux qu’elle aimait, et auxquels, moralement du moins, elle était rendue tout entière.

Pendant ce temps, M. Stepark, le Gouverneur et moi-même, nous nous obstinions à faire subir au vieil Hermann des inter-