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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

— Et enfin, ces jours-ci, ajoutai-je, pendant une de nos promenades, le capitaine Haralan et moi nous sommes passés devant sa maison, et j’ai reconnu ce Wilhelm Storitz au moment où il en sortait.

— On disait pourtant qu’il avait quitté la ville depuis quelques semaines, dit le docteur Roderich.

— On le croyait, et il s’est évidemment absenté, puisque Vidal l’a vu à Buda-Pest, intervint le capitaine Haraian, mais ce qui est certain, c’est qu’il est revenu.

La voix du capitaine Haralan dénotait une grande irritation.

Le docteur reprit en ces termes :

— Je vous ai répondu, monsieur Vidal, sur la situation de Wilhelm Storitz, Quant à son existence, qui se flatterait de la connaître ? Elle est absolument énigmatique. Il semble que cet homme vive en dehors de l’humanité.

— N’y a-t-il pas là quelque exagération ? fis-je observer au docteur.

— Quelque exagération sans doute, me répondit-il. Cependant, il appartient à une famille assez suspecte, et, avant lui, son père, Otto Storitz, prêtait aux plus singulières légendes.

— Qui lui ont survécu, docteur, si j’en juge par ce que j’ai lu dans une gazette à Buda-Pest. C’est à propos de l’anniversaire qui est célébré tous les ans à Spremberg, dans le cimetière de la ville. À en croire cette gazette, le temps n’a point affaibli les superstitieuses légendes auxquelles vous faites allusion. Le savant mort a hérité du savant vivant. C’était un sorcier, dit-on, qui possédait des secrets de l’autre monde et disposait d’un pouvoir surnaturel. Chaque année on s’attend, paraît-il, à voir quelque phénomène extraordinaire se produire autour de sa tombe,

— Donc, monsieur Vidal, conclut le docteur Roderich, vous ne vous étonnerez pas, d’après ce qu’on raconte à Spremberg, si, à Ragz, ce Wilhelm Storitz est regardé comme un personnage