Page:Verne - Le Sphinx des Glaces, 1897.djvu/383

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
347
que faire ?…

tendez bien ce que je vous répète une dernière fois !… Ce canot de l’Halbrane, c’est l’Halbrane elle-même !… J’en suis le capitaine, et malheur à celui de vous qui ne m’obéira pas ! »

En jetant ces derniers mots, le capitaine Len Guy regardait Hearne, visé par cette phrase d’un coup direct. Au surplus, le sealing-master n’avait point figuré dans cette dernière scène, — ouvertement du moins. Toutefois, qu’il eût poussé ses camarades à s’emparer du canot, et qu’il eût la pensée de les y exciter encore, cela ne faisait doute pour personne.

« Au campement, dit le capitaine Len Guy, et toi, Dirk Peters, reste là. »

Pour toute réponse, le métis remua sa grosse tête de bas en haut et s’installa à son poste.

L’équipage revint au campement, sans la moindre insistance. Les uns s’étendirent sur leurs couchettes, les autres se dispersèrent aux alentours.

Hearne ne chercha point à les rejoindre ni à se rapprocher de Martin Holt.

À présent que les matelots étaient réduits au désœuvrement, il n’y avait plus qu’à examiner cette situation très empirée et à imaginer les moyens d’en sortir.

Le capitaine Len Guy, le lieutenant, le bosseman, se réunirent en conseil, et je me joignis à eux.

Le capitaine Len Guy débuta en disant :

« Nous avons défendu notre canot, et nous continuerons à le défendre…

— Jusqu’à la mort ! déclara Jem West.

— Qui sait, dis-je, si nous ne serons pas bientôt forcés d’y embarquer ?…

— Dans ce cas, reprit le capitaine Len Guy, comme tous ne pourraient y prendre place, il y aurait nécessité de faire un choix. Le sort désignerait donc ceux qui devraient partir, et je ne demanderais pas à être traité autrement que les autres !