Page:Verne - Le Superbe Orénoque, Hetzel, 1898.djvu/131

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
117
TROIS PIROGUES NAVIGUANT DE CONSERVE.

naturellement, simplement, étranger à toute pose comme à toute préoccupation de se faire valoir.

Son compagnon, Germain Paterne, — vingt-huit ans, — adjoint à sa mission scientifique par le ministre, était breton, lui aussi. Issu d’une honorable famille de Rennes, son père, conseiller à la cour d’appel, sa mère et ses deux sœurs vivaient encore, tandis que Jacques Helloch, fils unique, avait perdu ses parents desquels il tenait une certaine fortune qui eût suffi à ses goûts pour le présent comme pour l’avenir.

Germain Paterne, non moins résolu que son ancien camarade de collège, mais d’un caractère très différent, allait où Jacques Helloch le conduisait, et ne présentait jamais aucune objection. Il était passionné pour l’histoire naturelle et plus particulièrement pour la botanique, et non moins pour la photographie. Il eût photographié sous la mitraille, et n’aurait pas plus « bougé » que son objectif. S’il n’était pas beau, il n’était pas laid, et peut-on l’être avec une physionomie intelligente, lorsqu’on possède une inaltérable bonne humeur ? Un peu moins grand que son ami, il jouissait d’une santé de fer, d’une constitution à toute épreuve, un marcheur insensible à la fatigue, doué d’un de ces estomacs qui digèrent des cailloux et ne se plaignent pas quand le dîner est sommaire ou se fait attendre. Ayant appris de quelle mission Jacques Helloch avait été chargé, il s’était proposé comme second. Quel meilleur compagnon, et plus utile et plus sûr, aurait pu trouver celui-ci, qui le connaissait de longue date ? En ce qui concernait la mission, elle durerait ce qu’elle durerait. Aucun terme ne lui était fixé. Elle devait s’étendre non seulement au cours de l’Orénoque, mais à ses tributaires à peine relevés sur les cartes, spécialement en sa partie moyenne jusqu’à San-Fernando, bourgade qui devait être le point extrême atteint par les explorateurs.

Il reste maintenant à dire dans quelles conditions, après avoir étudié l’Orénoque, depuis les multiples bras de son embouchure jusqu’à Ciudad-Bolivar, et de Ciudad-Bolivar à la Urbana, les deux