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LE SUPERBE ORÉNOQUE.

très certainement l’Atabapo et le Guaviare. D’ailleurs, les deux savants ne voulurent céder ni l’un ni l’autre, et la discussion se fût sans doute prolongée bien avant dans la nuit, si Jean de Kermor ne l’eût détournée en posant une question bien autrement sérieuse à M. Miguel.

D’après son guide, les rives du Meta étaient fréquentées par des Indiens redoutables. Aussi lui demanda-t-il ce qu’il pouvait leur apprendre à ce sujet.

« Cela nous intéresse évidemment davantage », répondit M. Miguel, qui ne fut pas fâché d’opérer une diversion.

En effet, ses deux collègues s’étaient « emballés », suivant leur habitude, et que serait-ce donc, lorsqu’ils se trouveraient au confluent des trois fleuves ?…

« Il s’agit des Quivas, reprit-il, une tribu dont la férocité n’est que trop connue des voyageurs qui naviguent jusqu’à San-Fernando. On parle même d’une bande de ces Indiens qui aurait franchi le fleuve et gagné les territoires de l’est, où elle se livre au pillage et au massacre.

— Est-ce que le chef de cette bande n’est pas mort ?… fit observer Jacques Helloch, qui n’était pas sans avoir entendu parler de ce ramassis de malfaiteurs.

— Il est mort, en effet, répondit M. Miguel, mort il y a deux ans environ.

— Et quel homme était-ce ?…

— Un nègre nommé Sarrapia, que la bande avait mis à sa tête et qu’elle a remplacé par un forçat en fuite…

— Les Quivas, demanda Jean, ceux qui sont restés sur les rives de l’Orénoque…

— Ils ne sont pas moins redoutables, affirma M. Miguel. La plupart des canots que nous avons rencontrés depuis Cariben leur appartiennent, et il sera prudent de nous tenir sur nos gardes, tant que nous n’aurons pas dépassé ces territoires, où ces pillards, capables de tous les crimes, sont encore très nombreux. »