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LE SUPERBE ORÉNOQUE.

monter sur sa colline du Calvaire, d’où le regard embrasse l’ensemble de ces maisons qui sont légèrement construites, afin de parer aux dangers des tremblements de terre, — tel celui de 1812, où périrent douze mille personnes.

On remarque cependant à Caracas de jolis parcs, plantés de groupes d’arbres dont la verdure est éternelle, quelques beaux édifices publics, un palais présidentiel, une cathédrale de belle architecture, des terrasses qui semblent dominer cette magnifique mer des Antilles, enfin toute l’animation d’une grande cité où l’on compte plus de cent mille habitants.

Et, cependant, ce spectacle ne fut pas pour distraire un seul instant le sergent Martial et son neveu de ce qu’ils étaient venus faire en cette ville. Ces huit jours, ils les occupèrent à réunir des renseignements relatifs au voyage qu’ils allaient entreprendre, qui les entraînerait peut-être jusqu’en ces régions lointaines et presque inconnues de la république vénézuélienne. Les indications qu’ils possédaient alors étaient bien incertaines, mais ils espéraient les compléter à San-Fernando. De là, Jean était résolu à continuer ses recherches aussi loin qu’il le faudrait, fût-ce sur les plus dangereux territoires du haut Orénoque.

Et si, alors, le sergent Martial voulait faire acte d’autorité, s’il prétendait empêcher Jean de s’exposer aux dangers d’une telle campagne, il se heurterait, — le vieux soldat ne le savait que trop, — à une ténacité vraiment extraordinaire chez un garçon de cet âge, une volonté que rien ne ferait fléchir, et il céderait, parce qu’il faudrait céder.

Voilà pourquoi ces deux Français, après être arrivés la veille à Ciudad-Bolivar, devaient en repartir le lendemain à bord du bateau à vapeur qui fait le service du bas Orénoque.

« Dieu nous protège, avait dit Jean… Oui !… qu’il nous protège… à l’aller comme au retour ! »