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Page:Verne - Le Superbe Orénoque, Hetzel, 1898.djvu/97

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ENTRE BUENA VISTA ET LA URBANA.

leurs congénères, ils restaient à Buena Vista, même après la période de la ponte.

Cette famille se composait du mari, — un homme vigoureux, vêtu du guayaco et du pagne traditionnels, — de sa femme, habillée de la longue chemise indienne, jeune encore, de petite taille, bien faite, — d’une enfant de douze ans, aussi sauvage que sa mère. Ces Indiens furent cependant sensibles aux cadeaux qu’offrirent leurs hôtes, du tafia et des cigares pour l’homme, des colliers de verroterie et un petit miroir pour la mère et sa fillette. Ces objets de pacotille sont prisés au plus haut degré chez les indigènes vénézuéliens.

Cette case ne possédait, en fait de mobilier, que des hamacs suspendus aux bambous de la toiture, et trois ou quatre de ces paniers, nommés canastos, où les Indiens déposent leurs vêtements et leurs ustensiles les plus précieux.

Quoi qu’en eût le sergent Martial, les passagers de la Maripare et lui durent partager cette hospitalité en commun, car son neveu et lui ne l’eussent rencontrée en aucune autre case. M. Miguel, plus encore que ses collègues, se montra très prévenant pour les deux Français. Jean de Kermor, tout en se tenant sur une réserve que lui imposaient d’ailleurs les regards fulminants de son oncle, eut l’occasion de faire plus ample connaissance avec ses compagnons de voyage. En outre, il fut promptement accaparé — c’est le mot, — par la petite indigène, qui se sentit attirée par sa bonne grâce.

On causa donc, tandis que la tempête mugissait au-dehors. La conversation fut fréquemment interrompue. Les éclats de la foudre se répercutaient si bruyamment qu’il eût été malaisé de s’entendre. Ni l’Indienne, ni la fillette ne manifestaient la moindre peur, alors même que l’éclair et le coup de tonnerre se produisaient ensemble. Et plus d’une fois, ainsi que cela devait être constaté le lendemain, des arbres voisins de la case furent foudroyés avec un horrible fracas.

Évidemment, les Indiens, habitués à ces orages qui sont fréquents sur l’Orénoque, n’éprouvaient pas cette impression que su-