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Page:Verne - Le Testament d’un excentrique, Hetzel, 1899.djvu/207

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le testament d’un excentrique

tirage qui le concernait, et, à neuf heures vingt-cinq minutes, il avait quitté Chicago.

Pas de temps perdu, on le voit, et il n’en fallait point perdre, étant donnée cette obligation de se trouver avant l’expiration des quinze jours à l’extrémité même de la presqu’île floridienne.

Neuf par quatre et cinq l’un des meilleurs coups de la partie ! Du premier bond, l’heureux joueur était envoyé à la cinquante-troisième case. Il est vrai, sur la carte dressée par William J. Hypperbone, c’était l’État de la Floride qui occupait cette case, le plus éloigné dans le sud-est de la République Nord-Américaine.

Les amis de Hodge Urrican, — mieux vaut dire ses partisans, car il n’avait pas d’amis, tandis que certaines gens croyaient à la chance d’un homme si mal embouché, — voulurent le féliciter à sa sortie de l’Auditorium.

« Et pourquoi, s’il vous plaît ?… répondit-il de ce ton acariâtre qui donnait tant de charme à sa conversation. Pourquoi me charger de vos compliments au moment de me mettre en route ?… Ça m’occasionnerait de l’excédent de bagages !

— Commodore, lui répétait-on, cinq et quatre, c’est un superbe début…

— Superbe… j’imagine… surtout pour ceux qui ont affaire en Floride !

— Remarquez, commodore, que vous devancez de beaucoup vos concurrents…

— Et ce n’est que juste, je pense, puisque le sort me fait partir le dernier !

— Évidemment, monsieur Urrican, et il suffirait, maintenant, d’amener le nombre dix pour arriver au but, et vous auriez enlevé la partie en deux coups…

— En vérité, messieurs !… Et si j’amène neuf, je ne pourrai pas même gagner le coup suivant… et si j’amène plus de dix, il me faudra rétrograder, sait-on jusqu’où ?…

— N’importe, commodore, tout autre à votre place serait satisfait…