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Page:Verne - Le Testament d’un excentrique, Hetzel, 1899.djvu/275

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le testament d’un excentrique

Alors, poussant Tom Crabbe en avant et comme remorqué par ce tug puissant, il fendit les flots du populaire et voulut monter sur l’estrade…

La place était prise, et qui l’occupait ?… Un porc, un énorme porc, colossal produit des deux races américaines Polant China et Red Jersey — un porc vendu à trois ans deux cent cinquante dollars, alors qu’il pesait déjà treize cent vingt livres, — un cochon phénoménal, sa longueur près de huit pieds, sa hauteur quatre, son tour de cou six, son tour de corps sept et demi, son poids actuel dix-neuf cent cinquante-quatre livres !…

Et c’était cet échantillon de la famille Suillienne qui avait été amené du Texas !… C’était lui dont les affiches annonçaient l’arrivée à Cincinnati !… C’était lui qui absorbait ce jour-là toute l’attention publique !… C’était lui que présentait aux applaudissements de la foule son heureux propriétaire !…

Voilà donc devant quel nouvel astre avait pâli l’astre de Tom Crabbe ! Un porc monstrueux qui allait être primé au concours de Spring Grove !…

John Milner, atterré, recula. Puis, faisant signe à Tom Crabbe de le suivre, il reprit le chemin de son hôtel par des rues détournées, et, désappointé, humilié, après s’être confiné dans sa chambre, il n’en voulut plus sortir.

Et si jamais Cincinnati eut l’occasion de recouvrer ce surnom de Porcopolis que venait de lui ravir Chicago, ce fut bien ce 30 mai 1897 !