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Page:Verne - Le Testament d’un excentrique, Hetzel, 1899.djvu/328

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les grottes du kentucky.

quand, après avoir franchi le portail du dôme de Goran, elle redescendit en barque le cours du Styx, lequel comme un Jourdain des entrailles terrestres, va se jeter dans une Mer Morte. Mais, s’il est vrai que là nul poisson ne peut vivre sous les eaux du fleuve de la Bible, il n’en est pas ainsi dans ce grand lac hypogéique. C’est par myriades qu’on y pêche des siredons et de ces cypronidons, dont l’appareil optique est complètement oblitéré, semblables aux espèces sans yeux que possèdent certaines eaux du Mexique.

Telles sont les incomparables merveilles de ces grottes, qui n’ont encore livré qu’une partie de leurs secrets. Sait-on ce qu’elles réservent à la curiosité de l’univers, et ne découvrira-t-on pas un jour tout un monde extraordinaire dans les entrailles du globe terrestre ?…

Enfin, les cinq jours que Jovita Foley et sa compagne devaient rester à Mammoth Caves entendirent sonner leurs dernières heures. C’était le 6 juin que la dépêche devait parvenir au bureau même de l’hôtel. Grâce à l’intérêt que cette agglomération de touristes portait à la cinquième partenaire, la matinée du lendemain se passerait dans une attente fiévreuse, — une impatience que Lissy Wag était seule peut-être à ne point ressentir.

Ce soir-là, le dîner vit recommencer avec une plus chaleureuse ardeur les toasts de la veille. Et avec quelle force éclateront les hurrahs, lorsque John Hamilton, suivant la règle adoptée par les gouverneurs d’admettre des dames en leurs états-majors, nomma Lissy Wag colonel et Jovita Foley lieutenant-colonel dans la milice illinoise.

Si l’une de ces nouveaux officiers, toujours modeste, se sentit quelque peu gênée de tant d’honneurs, l’autre les accueillit comme si elle avait toujours porté l’uniforme.

Et, le soir, lorsque toutes deux se furent retirées dans leur chambre :

« Eh bien, s’écria Jovita Foley, en faisant le salut militaire, est-ce assez complet, mon colonel ?…