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les « six ».

— Et quand est-il parti ?…

— Je ne sais pas.

— Et quand reviendra-t-il ?…

— Je ne sais pas. »

Et en effet, Tommy ne savait pas, parce que Max Réal était sorti de grand matin, sans rien dire à Tommy, lequel aimait à dormir comme un enfant, et que son maître n’eût pas voulu tirer de sommeil de si bonne heure.

Mais de ce que Tommy ne pouvait répondre aux demandes des reporters, il ne faudrait pas en conclure que le Chicago Globe manquerait d’informations au sujet de Max Réal. Non ! ce « Six » avait été déjà l’objet d’interviews fort répandues aux États-Unis.

C’était un jeune peintre de talent, un paysagiste dont les toiles commençaient à se vendre à hauts prix en Amérique, et auquel l’avenir réservait une belle situation dans le domaine de l’art. Né à Chicago, si son nom était d’origine française, c’est qu’il descendait d’une famille canadienne de Québec. Là demeurait encore Mme Réal, veuve depuis quelques années, qui se disposait à venir s’installer près de lui dans la métropole illinoise.

Max Réal adorait sa mère, qui lui rendait la même adoration, — une excellente mère et un excellent fils. Aussi n’avait-il pas voulu tarder d’un jour pour la mettre au courant de ce qui s’était passé, et comment il avait été désigné pour prendre une place spéciale aux obsèques de William J. Hypperbone. Il l’assurait d’ailleurs qu’il ne s’emballait guère sur les conséquences des dispositions testamentaires du défunt. Cela lui semblait « drôle », voilà tout.

Max Réal venait d’atteindre sa vingt-cinquième année. Il tenait de sa naissance la grâce, la distinction, l’élégance du type français. Il était d’une taille au-dessus de la moyenne, châtain de cheveux et de barbe, les yeux d’un bleu foncé, la tête haute sans morgue ni raideur, la bouche souriante, la marche délibérée, indices de ce contentement intérieur, d’où naît la confiance joyeuse et inaltérable. Il y avait en lui une grande expansion de cette puissance vitale, qui se