Page:Verne - Le Volcan d’or version originale.djvu/73

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et grandioses qui se présentaient à chaque détour du défilé, ces massifs de pins et de bouleaux, couverts de givre, qui se hissaient jusqu’à la crête du talus, ces torrents que le froid n’avait pu saisir, et qui bondissaient tumultueusement jusqu’au fond des abîmes dont la profondeur échappait aux regards.

Le Sheep Camp n’était distant de Dyea que de quatre lieues ; quelques heures devaient donc permettre de les franchir. Il est vrai, la passe se développait en rampes très raides ; les attelages, qui ne marchaient qu’au pas, fréquemment s’arrêtaient, et ce n’était pas sans peine que le conducteur les obligeait à se remettre en marche.

Tout en cheminant, Ben Raddle et Summy Skim causaient avec le Scout, et celui-ci, à une question qui lui fut posée, répondit :

« Je compte bien arriver au Sheep Camp vers cinq ou six heures, et c’est là que nous nous installerons jusqu’au matin…

— Est-ce que nous trouverons une auberge où nos deux compagnes pourront prendre quelque repos demanda Summy Skim.

— Il y en a, répondit Bill Stell, car le Sheep Camp est un lieu de halte pour les émigrants.

— Mais, reprit Ben Raddle, n’est-il pas a craindre qu’il soit encombré ?…

— Ce n’est pas douteux, affirma le Scout, et d’ailleurs ses auberges sont peu engageantes. Peut-être sera-t-il préférable de dresser nos tentes et d’y passer la nuit.

— Messieurs, dit sœur Marthe, qui de son traîneau avait entendu cette conversation, nous ne voulons point être une cause de gêne.

— De gêne, ma sœur ! répondit Summy Skim. Et en quoi pourriez-vous nous gêner ?… Est-ce que nous n’avons pas deux tentes ?… L’une vous sera réservée… nous occuperons l’autre…

— Et avec nos deux petits poëles qui brûleront jusqu’au jour, ajouta Bill Stell, il n’y aura rien à craindre du froid, quoiqu’il soit vif en ce moment.

— Merci, messieurs, dit sœur Madeleine, mais quand il vous conviendra de voyager de nuit, il ne faut pas que notre présence vous en empêche.

— Soyez tranquille, ma sœur, déclara Summy Skim en riant, et tenez pour certain que nous ne vous épargnerons ni ennuis ni fatigues. »

La caravane atteignit Sheep Camp vers six heures. En arrivant, les attelages étaient harassés. On se hâta de les dételer, et les gens du Scout s’occupèrent de leur nourriture.

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