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le volcan d’or.

le sol est recouvert de dix à douze pieds de neige, lorsque, sur ces épaisses couches saisies par des froids de quarante à cinquante degrés et rendues aussi dures que du granit, se brisent le pic et la pioche.

Aussi, ceux des prospecteurs qui le peuvent, ceux que la chance a favorisés dans une certaine mesure préfèrent-ils revenir dans les principales villes de la Colombie. Ceux-là ont de l’or à dépenser, et ils le dépensent avec une prodigalité insouciante dont on ne saurait se faire une idée. Ils ont cette conviction que la fortune ne les abandonnera pas, que la saison prochaine sera fructueuse, que de nouveaux gisements seront découverts et mettront entre leurs mains des monceaux de pépites. À eux les meilleures chambres dans les hôtels et les meilleures cabines dans les paquebots.

Summy Skim l’eut promptement constaté, c’est parmi cette catégorie de mineurs que figuraient les gens les plus violents, les plus grossiers, les plus tapageurs, ceux qui se livraient à tous les excès dans les tripots, dans les casinos où, l’argent à la main, ils parlaient en maîtres.

À vrai dire, le brave Summy se préoccupait peu de cette engeance. Estimant, ce en quoi il se trompait peut-être, qu’il ne pouvait avoir jamais rien de commun avec l’un quelconque de ces peu recommandables aventuriers, il écoutait d’une oreille distraite ce que la rumeur publique lui apprenait sur leur compte, et bientôt il n’y pensait plus.

Le 14 avril, dans la matinée, Ben Raddle et lui se promenaient sur le quai, lorsque la sirène d’un steamer se fit entendre.

« Serait-ce enfin le Foot Ball ? s’écria Summy.

— Je ne le pense pas, répondit Ben Raddle. Ces sifflets viennent du sud, et c’est par le nord que le Foot Ball doit arriver. »

Il s’agissait, en effet, d’un vapeur qui ralliait le port de Vancouver en remontant le détroit de Juan-de-la-Fuca et qui, par conséquent, ne pouvait venir de Skagway.