Page:Verne - Les Enfants du capitaine Grant.djvu/349

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pandu. Les chercheurs se dirigèrent vers le Summerhill et le Leni’s Pond. La ville d’Ophir fut fondée et, par la richesse des exploitations, elle se montra bientôt digne de son nom biblique.

Jusqu’alors il n’était pas question de la province de Victoria, qui devait cependant l’emporter par l’opulence de ses gîtes.

En effet, quelques mois plus tard, au mois d’août 1851, les premières pépites de la province furent déterrées, et bientôt quatre districts se virent largement exploités. Ces quatre districts étaient ceux de Ballarat, de l’Ovens, de Bendigo et du mont Alexandre, tous très-riches ; mais sur la rivière d’Ovens, l’abondance des eaux rendait le travail pénible ; à Ballarat, une répartition inégale de l’or déjouait souvent les calculs des exploitants ; à Bendigo, le sol ne se prêtait pas aux exigences du travailleur. Au mont Alexandre, toutes les conditions de succès se trouvèrent réunies sur un sol régulier, et ce précieux métal, valant jusqu’à quatorze cent quarante et un francs la livre, atteignit le taux le plus élevé de tous les marchés du monde.

C’était précisément à ce lieu si fécond en ruines funestes et en fortunes inespérées que la route du trente-septième parallèle conduisait les chercheurs du capitaine Harry Grant.

Après avoir marché pendant toute la journée du 31 décembre sur un terrain très-accidenté qui fatigua les chevaux et les bœufs, ils aperçurent les cimes arrondies du mont Alexandre. Le campement fut établi dans une gorge étroite de cette petite chaîne, et les animaux allèrent, les entraves aux pieds, chercher leur nourriture entre les blocs de quartz qui parsemaient le sol. Ce n’était pas encore la région des placers exploités. Le lendemain seulement, premier jour de l’année 1866, le chariot creusa son ornière dans les routes de cette opulente contrée.

Jacques Paganel et ses compagnons furent ravis de voir en passant ce mont célèbre, appelé Geboor dans la langue australienne. Là, se précipita toute la horde des aventuriers, les voleurs et les honnêtes gens, ceux qui font pendre et ceux qui se font pendre. Aux premiers bruits de la grande découverte, en cette année dorée de 1851, les villes, les champs, les navires, furent abandonnés des habitants, des squatters et des marins. La fièvre de l’or devint épidémique, contagieuse comme la peste, et combien en moururent, qui croyaient déjà tenir la fortune ! La prodigue nature avait, disait-on, semé des millions sur plus de vingt-cinq degrés de latitude dans cette merveilleuse Australie. C’était l’heure de la récolte, et ces nouveaux moissonneurs couraient à la moisson. Le métier du « digger, » du bêcheur, primait tous les autres, et, s’il est vrai que beaucoup succombèrent à la tâche, brisés par les fatigues, quelques-uns, cependant, s’en-