Page:Verne - Les Enfants du capitaine Grant.djvu/98

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pierre conduisait à la porte, seule ouverture de la cahute, et, quelque étroite qu’elle fût, les ouragans, la neige ou la grêle, savaient bien s’y frayer un passage, lorsque les temporales les déchaînaient dans la montagne.

Dix personnes pouvaient aisément y tenir place, et si ses murs n’eussent pas été suffisamment étanches dans la saison des pluies, à cette époque du moins ils garantissaient à peu près contre un froid intense que le thermomètre portait à dix degrés au-dessous de zéro. D’ailleurs, une sorte de foyer avec tuyau de briques fort mal rejointoyées permettait d’allumer du feu et de combattre efficacement la température extérieure.

« Voilà un gîte suffisant, dit Glenarvan, s’il n’est pas confortable. La Providence nous y a conduits, et nous ne pouvons faire moins que de l’en remercier.

— Comment donc, répondit Paganel, mais c’est un palais. Il n’y manque que des factionnaires et des courtisans. Nous serons admirablement ici.

— Surtout quand un bon feu flambera dans l’âtre, dit Tom Austin, car si nous avons faim, nous n’avons pas moins froid, il me semble, et, pour ma part, un bon fagot me réjouirait plus qu’une tranche de venaison.

— Eh bien, Tom, répondit Paganel, on tâchera de trouver du combustible.

— Du combustible au sommet des Cordillères ! dit Mulrady en secouant la tête d’un air de doute.

— Puisqu’on a fait une cheminée dans cette casucha, répondit le major, c’est probablement parce qu’on trouve ici quelque chose à brûler.

— Notre ami Mac Nabbs a raison, dit Glenarvan ; disposez tout pour le souper ; je vais aller faire le métier de bûcheron.

— Je vous accompagne avec Wilson, répondit Paganel.

— Si vous avez besoin de moi ?… dit Robert en se levant.

— Non, repose-toi, mon brave garçon, répondit Glenarvan. Tu seras un homme à l’âge où d’autres ne sont encore que des enfants ! »

Glenarvan, Paganel et Wilson sortirent de la casucha. Il était six heures du soir. Le froid piquait vivement malgré le calme absolu de l’atmosphère. Le bleu du ciel s’assombrissait déjà, et le soleil effleurait de ses derniers rayons les hauts pics des plateaux andins. Paganel, ayant emporté son baromètre, le consulta, et vit que le mercure se maintenait à 0,495 millimètres. La dépression de la colonne barométrique correspondait à une élévation de onze mille sept cents pieds. Cette région des Cordillères avait donc une altitude inférieure de neuf cent dix mètres