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Page:Verne - Les Frères Kip, Tome I et II, 1903.djvu/124

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LES FRÈRES KIP

— Vous n’avez pas eu la pensée de remonter vers l’intérieur ?… dit Nat Gibson.

— Si, répondit l’aîné, mais il eût fallu s’aventurer à travers des forêts épaisses, au risque de s’y perdre, et dans lesquelles nous n’aurions peut-être pas trouvé à subsister.

— Et puis, reprit l’autre, où cela nous aurait-il conduits puisque, vous venez de nous l’apprendre, nous étions sur une ile déserte ?… Mieux valait encore ne point abandonner le rivage… C’eût été renoncer à toute chance d’être aperçus, si un navire venait en vue, et d être sauvés, comme nous le sommes…

— Vous avez eu raison.

— Et ce brick… quel est-il ?… demanda le plus jeune frère.

— Le brick anglais James-Cook.

— Et son capitaine ?…

— C’est moi, répondit M. Gibson.

— Eh bien, capitaine, dit l’aîné en serrant la main de M. Gibson, vous voyez que nous avons bien fait de vous attendre sur cette pointe ! »

En effet, à contourner la base du Pitt-Mount, ou même à vouloir atteindre sa cime, les naufragés, éprouvant des difficultés insurmontables, seraient tombés d’épuisement et de fatigue au milieu des infranchissables forêts de l’intérieur.

« Mais comment avez-vous pu vivre dans ces conditions de dénuement ?… reprit alors M. Gibson.

— Notre nourriture consistait en quelques produits végétaux, répondit l’aîné, des racines déterrées çà et là, des choux-palmistes coupés à la tête des arbres, de l’oseille sauvage, du laiteron et du fenouil marin, des pommes de pin de l’araucaria… Si nous avions eu des lignes ou pu en fabriquer, il n’aurait pas été difficile de se procurer du poisson, car il abonde au pied des roches…

— Et du feu ?… Comment avez vous pu en faire ?…