ciments avec O’Brien et Macarthy, ils n’avaient eu que très rarement l’occasion de les rencontrer. Maintenant, d’ailleurs, connaissant l’histoire de ces fenians, déportés pour cause politique, ils s’oubliaient eux-mêmes pour s’apitoyer sur le sort de ces patriotes irlandais.
Dès que le troupeau humain fut sur l’emplacement de la future ferme, les travaux commencèrent. À la limite de la clairière qui devait être ménagée en cette partie de la forêt, Karl et Pieter Kip, sous la conduite d’un des gardiens, allèrent marquer les arbres destinés à l’abattage, suivant les indications du plan.
Il faisait un temps assez frais. L’hiver approchant, nombre de branches mortes jonchaient déjà le sol au milieu des feuilles sèches. Seules, les essences à verdure persistaient ; des chênes verts, des pins maritimes, avaient conservé leur frondaison. Le vent du large, qui soufflait de l’ouest, passait à travers tout le cliquetis des ramures. À l’air embaumé du parfum des espèces résineuses se mêlaient de puissantes senteurs marines. On entendait aussi les grondements du ressac contre les roches du littoral, au-dessus duquel s’éparpillèrent des bandes d’oiseaux de nuit.
Assurément, O’Brien et Macarthy devaient penser que, dans ces conditions, aucun canot n’aurait pu accoster le littoral. Quant à Farnham, après s’être hissé jusqu’à la crête de la falaise, il avait constaté que pas un bâtiment ne se montrait sur cette partie de Storm-Bay. Donc, ou l’Illinois n’était pas encore arrivé, ou il se trouvait encore sur rade.
Depuis quelques mois, en prévision des travaux de la ferme, une route avait été ouverte entre Port-Arthur et cette portion de la presqu’île, — route assez fréquentée, car elle desservait d’autres établissements agricoles. Aussi plusieurs passants s’arrêtaient-ils parfois, regardant les déportés à l’ouvrage. Il va de soi qu’on les