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Page:Verne - Les Frères Kip, Tome I et II, 1903.djvu/415

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LES FENIANS.

Parmi ceux-ci, Karl et Pieter Kip procédaient au marquage des arbres, entre autres celui près duquel Walter s’était un instant arrêté. Il y avait donc lieu de craindre que la feuille dont il était enveloppé ne laissât voir le billet, qui serait ramassé et remis entre les mains du chef.

Aussitôt l’éveil serait donné… Dès le retour des escouades à Port-Arthur, une surveillance sévère s’organiserait à l’intérieur et à l’extérieur du pénitencier… On consignerait les convicts, qui ne reprendraient leurs travaux que dans quelques jours… La tentative d’évasion serait manquée… Lorsque l’Illinois enverrait son canot pour embarquer les deux fenians, il ne trouverait personne à l’endroit convenu. Après une attente de quelques heures, il n’aurait plus qu’à regagner la haute mer…

Cependant le soleil commençait à décliner. La masse des vapeurs s’accumulait sur l’horizon de l’ouest. À six heures, le chef des constables donnerait le signal de retraite, afin que les escouades fussent rentrées à Port-Arthur avant la nuit. Or, il ne suffisait pas que Farnham pût se rendre au pied de l’arbre, il fallait qu’il fit assez jour encore pour qu’il aperçût la feuille roulée autour du billet. S’il ne parvenait pas à la ramasser aujourd’hui, il serait ensuite trop tard. Le vent, la pluie qui menaçait, auraient détrempé et chassé les feuilles tombées sur le sol.

Les Irlandais ne quittaient pas Farnham des yeux.

« Qui sait, murmurait O’Brien à l’oreille de son compagnon, qui sait si ce n’était pas aujourd’hui que nos amis projetaient de nous enlever ?… »

Aujourd’hui ?… Non, ce n’était pas probable. Ne fallait-il pas laisser à Farnham le temps de prendre les dernières mesures, et aux Irlandais le temps de gagner le littoral au point indiqué ?… Mais, dans quarante-huit heures au plus, sans doute, l’embarcation de l’Illinois serait à son poste…