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sur l’échelle oscillante.

pagne qui pût véritablement convenir à son fils ? N’était-ce pas là comme une faveur du Ciel ?

Aussi, le vieil overman se promettait-il bien que, si ce mariage se faisait, ce jour-là, il y aurait à Coal-city une fête qui ferait époque pour les mineurs de la Nouvelle-Aberfoyle.

Simon Ford ne savait pas si bien dire !

Il faut ajouter qu’un autre encore désirait non moins ardemment cette union de Nell et d’Harry. C’était l’ingénieur James Starr. Certes, le bonheur de ces deux jeunes gens, il le voulait par-dessus tout. Mais un mobile, d’un intérêt plus général, peut-être, le poussait aussi dans ce sens.

On le sait, James Starr avait conservé certaines appréhensions, bien que rien dans le présent ne les justifiât plus. Cependant, ce qui avait été pouvait être encore. Ce mystère de la nouvelle houillère, Nell était évidemment la seule à le connaître. Or, si l’avenir devait réserver de nouveaux dangers aux mineurs d’Aberfoyle, comment se mettre en garde contre de telles éventualités, sans en savoir au moins la cause ?

« Nell n’a pas voulu parler, répétait souvent James Starr, mais ce qu’elle a tu jusqu’ici à tout autre, elle ne saurait le taire longtemps à son mari ! Le danger menacerait Harry comme il nous menacerait nous-mêmes. Donc, un mariage qui doit donner le bonheur aux époux et la sécurité à leurs amis, est un bon mariage, ou il ne s’en fera jamais ici-bas ! »

Ainsi raisonnait, non sans quelque logique, l’ingénieur James Starr. Ce raisonnement, il le communiqua même au vieux Simon, qui ne fut pas sans le goûter. Rien ne semblait donc devoir s’opposer à ce qu’Harry devînt l’époux de Nell.

Et qui donc l’aurait pu ? Harry et Nell s’aimaient. Les vieux parents ne rêvaient pas d’autre compagne pour leur fils. Les camarades d’Harry enviaient son bonheur, tout en reconnaissant qu’il lui était bien dû. La jeune fille ne relevait que d’elle-même et n’avait d’autre consentement à obtenir que celui de son propre cœur.

Mais, si personne ne semblait pouvoir mettre obstacle à ce mariage, pourquoi, lorsque les disques électriques s’éteignaient à l’heure du repos, quand la nuit se faisait sur la cité ouvrière, lorsque les habitants de Coal-city avaient regagné leur cottage, pourquoi, de l’un des coins les plus sombres de la Nouvelle Aberfoyle, un être mystérieux se glissait-il dans les ténèbres ? Quel instinct guidait ce fantôme à travers certaines galeries si étroites qu’on devait les croire impraticables ? Pourquoi cet être énigmatique, dont les yeux perçaient la plus pro-