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premières recherches. Autant vouloir retrouver les traces d’un follet sur l’eau d’un marécage ! »

Cette première partie de l’enquête ne produisit donc aucun résultat. Il n’était pas probable que la seconde partie en donnât davantage.

Il s’agissait d’établir, en effet, comment le feu avait pu être allumé au sommet de la vieille tour, quels éléments avaient été fournis à la combustion, et enfin quels résidus cette combustion avait laissés.

Sur le premier point, rien, ni restes d’allumettes, ni chiffons de papier, ayant pu servir à allumer un feu quelconque.

Sur le second point, néant non moins absolu. On ne retrouva ni herbes desséchées, ni fragments de bois, dont ce foyer, si intense, avait pourtant dû être largement alimenté pendant la nuit.

Quant au troisième point, il ne put être éclairci davantage. L’absence de toutes cendres, de tout résidu d’un combustible quelconque, ne permit pas même de retrouver l’endroit où le foyer avait dû être établi. Il n’existait aucune place noircie, ni sur la terre, ni sur la roche. Fallait-il donc en conclure que le foyer avait été tenu par la main de quelque malfaiteur ? C’était bien invraisemblable, puisque, au dire des témoins, la flamme présentait un développement gigantesque, tel que l’équipage du Motala avait pu, malgré les brumes, l’apercevoir de plusieurs milles au large.

« Bon ! s’écria Jack Ryan, la Dame de feu sait bien se passer d’allumettes ! Elle souffle, cela suffit à embraser l’air autour d’elle, et son foyer ne laisse jamais de cendres ! »

Il résulta donc de tout ceci que les magistrats en furent pour leur peine, qu’une nouvelle légende s’ajouta à tant d’autres, — légende qui devait perpétuer le souvenir de la catastrophe du Motala et affirmer plus indiscutablement encore l’apparition des Dames de feu.

Cependant, un si brave garçon que Jack Ryan, et d’une si vigoureuse constitution, ne pouvait demeurer longtemps alité. Quelques foulures et luxations n’étaient pas pour le coucher sur le flanc plus qu’il ne convenait. Il n’avait pas le temps d’être malade. Or, lorsque ce temps-là manque, on ne l’est guère dans ces régions salubres des Lowlands.

Jack Ryan se rétablit donc promptement. Dès qu’il fut sur pied, avant de reprendre sa besogne à la ferme de Melrose, il voulut mettre certain projet à exécution. Il s’agissait d’aller faire visite à son camarade Harry, afin de savoir pourquoi celui-ci avait manqué à la fête du clan d’Irvine. De la part d’un homme tel qu’Harry, qui ne promettait jamais sans tenir, cette absence ne