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Aux mollusques s’ajoutaient les crustacés. Les criques de l’île Hoste sont particulièrement recherchées par un crabe gigantesque habitué des algues sous-marines, le centoya, dont deux suffisent à la nourriture quotidienne d’un homme de grand appétit.

Mais ces crabes ne sont pas les uniques représentants du genre. Sur la côte, on trouvait également en abondance les homards, les langoustes et les moules. Ces richesses étaient largement exploitées. Réalisation de l’un des projets autrefois formés par le Kaw-djer, Halg dirigeait au Bourg-Neuf une usine prospère, d’où, sous forme de conserves, on expédiait ces crustacés dans le monde entier. Halg, alors âgé de près de vingt-huit ans, réunissait toutes les conditions de bonheur. Femme aimante, trois beaux enfants : deux filles et un garçon, santé parfaite, fortune rapidement ascendante, rien ne lui manquait. Il était heureux, et le Kaw-djer pouvait s’applaudir dans son œuvre achevée.

Quant à Karroly, non seulement il n’était pas associé à son fils dans la direction de l’usine du Bourg-Neuf, mais il avait même renoncé à la pêche. Étant donné l’importance maritime du port de l’île Hoste, situé entre le Darwin Sound et la baie de Nassau, les navires y venaient nombreux, et de préférence même à Punta-Arenas. Ils y trouvaient une excellente relâche, plus sûre que celle de la colonie chilienne, surtout fréquentée, d’ailleurs, par les steamers qui passent d’un océan à l’autre en suivant le détroit de Magellan. Karroly avait été pour cette raison amené à reprendre son ancien métier. Devenu capitaine de port et pilote-chef de l’île Hoste, il était très demandé par les bâtiments à destination de Punta-Arenas ou des comptoirs établis sur les canaux de l’archipel, et l’occupation ne lui manquait pas.

Il avait maintenant à son service un côtre de cinquante tonneaux, construit à l’épreuve des plus violents coups de mer. C’est avec ce solide bateau, que manœuvrait un équipage de cinq hommes, et non avec la chaloupe, qu’il se portait par tous les temps à la rencontre des navires. La Wel-Kiej existait toujours cependant, mais on ne l’utilisait plus guère. En général, elle restait au port, vieille et fidèle servante qui avait bien gagné le repos.

Comme ces bons ouvriers qui s’empressent d’entreprendre un