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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

Cook se rapprocha donc de terre, malgré les dangers de cette route, et suivit la côte de l’Australie vers le nord. Le 21 août, il doubla la pointe la plus septentrionale de la Nouvelle-Hollande, à laquelle il donna le nom de cap York, et s’engagea dans un chenal semé d’îles près de la grande terre, ce qui lui fit concevoir l’espoir d’avoir enfin découvert le passage de la mer de l’Inde. Puis, il atterrit encore une fois, arbora le pavillon anglais, prit solennellement possession, au nom du roi Georges III, de toute la côte orientale, depuis le trente-huitième degré de latitude jusqu’à cet endroit, situé au dixième et demi sud, donna à ce pays le nom de Nouvelle-Galles du Sud, et, pour clore dignement cette cérémonie, fit tirer trois volées de canon.

Cook alors pénétra dans le détroit de Torrès, qu’il appela détroit de l’Endeavour, découvrit et nomma les îles Wallis, situées au milieu de l’entrée sud-ouest, l’île Booby, les îles du prince de Galles, et il se dirigea vers la côte méridionale de la Nouvelle-Guinée, qu’il suivit jusqu’au 3 septembre, sans pouvoir débarquer.

Ce jour-là, avec onze personnes bien armées, parmi lesquelles étaient Solander, Banks et ses domestiques, Cook descendit à terre. À peine étaient-ils éloignés du bateau d’un quart de mille, que trois Indiens sortirent des bois en poussant de grands cris et coururent sus aux Anglais.

« Celui qui s’approcha le plus, dit la relation, lança de sa main quelque chose qui fut porté sur un de ses côtés et qui brûlait comme de la poudre à canon ; mais nous n’entendions point de bruit. »

Cook et ses compagnons furent obligés de tirer sur ces naturels pour regagner leur embarcation, d’où ils purent les examiner à loisir. Ils ressemblaient tout à fait aux Australiens, portaient comme eux les cheveux courts et étaient entièrement nus ; seulement, leur peau paraissait un peu moins foncée, — sans doute parce qu’elle n’était pas aussi sale.

« Pendant ce temps, les indigènes lâchaient leurs feux par intervalles, quatre ou cinq à la fois. Nous ne pouvons imaginer ce que c’est que ces feux, ni quel était leur but en les jetant ; ils avaient dans leurs mains un bâton court, peut-être une canne creuse, qu’ils agitaient de côté et d’autre, et à l’instant nous voyions du feu et de la fumée, exactement comme il en part d’un coup de fusil, et qui ne duraient pas plus longtemps. On observa du vaisseau ce phénomène surprenant, et l’illusion y fut si grande, que les gens à bord crurent que les Indiens avaient des armes à feu ; et nous n’aurions pas douté nous-mêmes qu’ils ne tirassent sur nous des coups de fusil, si notre bateau n’avait pas été assez près pour entendre dans ce cas le bruit de l’explosion. »