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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

d’Angleterre, le gouverneur s’entendit avec lord Macartney sur la manière de placer et de classer les différents objets. Ceux-ci furent installés dans une vaste salle, bien décorée, où ne se trouvaient, d’ailleurs, que le trône et quelques vases de vieille porcelaine.

Nous n’entrerons pas dans le détail des négociations interminables auxquelles donna lieu la prétention des Chinois de faire se prosterner l’ambassadeur d’Angleterre devant l’empereur, prétention humiliante, suffisamment indiquée par l’inscription placée au-dessus des pavillons des yachts et des chariots de l’ambassade : Ambassadeur portant tribut du pays d’Angleterre.

C’est dans la cité chinoise, à Pékin, qu’est situé ce champ que l’empereur ensemence chaque printemps, conformément à l’ancien usage. C’est là aussi que se trouve le Temple de la Terre, où se rend le souverain, au moment du solstice d’été, pour reconnaître le pouvoir de l’astre qui éclaire le monde, et le remercier de sa bienfaisante influence.

Pékin n’est que le siège du gouvernement de l’empire ; là, ni manufactures, ni port, ni commerce.

La population de Pékin est évaluée par Macartney à trois millions d’habitants. Les maisons à un seul étage de la ville sembleraient ne pouvoir suffire à une telle population ; mais il est bon de savoir qu’une seule maison suffit pour une famille comprenant trois générations. Cette densité des habitants s’explique également par la précocité des mariages. Ces unions hâtives sont, chez les Chinois, une mesure de prévoyance, parce que les enfants, et particulièrement les fils, sont obligés de prendre soin de leurs parents.

Le 2 septembre 1793, l’ambassade quitta Pékin. Macartney fit le voyage en chaise de poste, et il est probable que semblable voiture roulait pour la première fois sur la route de Tartarie.

À mesure qu’on s’éloigne de Pékin, la route monte, le sol devient plus sablonneux et contient moins d’argile et de terre noire. Bientôt, on rencontra d’immenses étendues de terrain plantées en tabac ; pour Macartney, l’usage de cette plante n’est pas venu d’Amérique, et l’habitude de fumer a dû naître spontanément sur le sol asiatique.

Avec la qualité du sol, la population diminuait. On ne tarda pas à s’en apercevoir. En même temps, le nombre des Tartares augmentait, et la différence entre les mœurs des Chinois et de leurs conquérants devenait moins sensible.

Le cinquième jour de leur voyage, les Anglais aperçurent la grande muraille devenue légendaire.