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great-eyry

être alimenté que par les eaux du ciel, et, si nous n’en trouvions trace, cela indiquait bien qu’il ne prenait pas source dans les hauteurs du Great-Eyry.

Après une demi-heure de cheminement, la montée devint si dure qu’il fallait obliquer tantôt à droite, tantôt à gauche et s’allonger de multiples détours. La gorge devenait véritablement impraticable, le pied n’y rencontrait plus un point d’appui suffisant. Il eût été nécessaire de s’accrocher aux touffes d’herbes, de ramper sur les genoux, et, dans ces conditions, notre ascension ne se fût pas terminée avant le coucher du soleil…

« Ma foi, s’écria M. Smith en reprenant haleine, je comprends que les touristes du Great-Eyry aient été rares… si rares même qu’il n’y en a jamais eu à ma connaissance !…

— Le fait est, répondis-je, que ce seraient bien des fatigues pour un mince résultat !… Et si nous n’avions des raisons particulières de mener à bonne fin notre tentative…

— Rien de plus vrai, déclara Harry Horn, et mon camarade et moi, qui sommes plusieurs fois montés au sommet du Black-Dome, nous n’avons jamais rencontré tant de difficultés !…

— Difficultés qui pourraient bien devenir des obstacles ! » ajouta James Bruck.

La question, maintenant, était de décider par quel côté nous chercherions une route oblique. À droite, à gauche se dressaient des massifs touffus d’arbres et d’arbustes. En somme, le vrai était de s’aventurer là où les pentes seraient moins accusées. Peut-être, à travers la partie boisée, après en avoir franchi la lisière, mes compagnons et moi pourrions-nous marcher d’un pied plus sûr. Dans tous les cas, on n’irait point en aveugles. Toutefois, il convenait de ne pas l’oublier, les versants orientaux des Montagnes-Bleues ne sont guère praticables sur toute l’étendue de la chaîne, sous l’inclinaison d’une cinquantaine de degrés.