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mathias sandorf.

cours d’eau assez profond pour que les navires, même d’un fort tirant d’eau, puissent le remonter presque au pied des monts Vlastiza. Vers neuf heures, il revint sur le môle, il assista à l’arrivée d’un grand paquebot du Lloyd, qui venait de la mer des Indes ; enfin, il regagna son bord, descendit dans sa chambre, éclairée par deux lampes, et il y resta seul jusqu’au lendemain.

C’était son habitude, et le capitaine de la Savarèna — un marin d’une quarantaine d’années, nommé Narsos — avait ordre de ne jamais troubler le docteur pendant ces heures de solitude.

Il faut dire que si le public ne connaissait rien du passé de ce personnage, ses officiers et les hommes de son bord n’en savaient pas plus. Ils ne lui en étaient pas moins dévoués de corps et d’âme. Si le docteur Antékirtt ne tolérait pas la moindre infraction à la discipline du bord, il était bon pour tous, donnant soins et argent, sans compter. Aussi, pas un matelot qui ne se fût empressé de figurer sur le rôle de la Savarèna. Jamais une réprimande à adresser, jamais une punition à infliger, jamais une expulsion à faire. C’étaient comme les membres d’une même famille, qui formaient l’équipage de la goélette.

Après la rentrée du docteur, toutes les dispo-