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mathias sandorf.

de longue date ? Enfin parlèrent-ils du passé, du présent, de l’avenir ? C’est ce qu’on ne pourrait dire, car cet entretien ne fut troublé par personne.

Mais voici ce qui en résulta.

Vingt-quatre heures après, une nouvelle, bien faite pour étonner, courait la ville. On parlait du mariage de Sarcany, — un riche personnage de la Tripolitaine, — avec Mlle Sava Toronthal.

Évidemment, le banquier avait dû céder aux menaces de l’homme qui pouvait le perdre d’un mot. Aussi, ni les prières de sa femme, ni l’horreur manifestée par Sava, dont son père prétendait disposer à sa seule convenance, rien ne devait-il le toucher.

Un mot seulement de l’intérêt que Sarcany avait à faire ce mariage, — intérêt qu’il n’avait point dissimulé à Silas Toronthal. Sarcany était maintenant ruiné. Cette part de fortune, qui avait permis au banquier de rétablir le crédit de sa maison, c’est à peine si elle avait suffi à l’aventurier pendant cette période de quinze ans. Depuis son départ de Trieste, Sarcany avait couru l’Europe, vivant en prodigue, pour qui les hôtels de Paris, de Londres, de Berlin, de Vienne, de Rome, n’eurent jamais assez de fenêtres pour qu’il pût y jeter l’argent au gré de ses fantaisies. Après les plaisirs de toutes