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Page:Verne - Mathias Sandorf, Hetzel, 1885, tome 3.djvu/102

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mathias sandorf.

ce qu’on appelle les grands joueurs. Là, enfin, des fortunes ou des ruines se sont faites avec une rapidité vertigineuse, dont les Bourses de Paris, de New-York ou de Londres pourraient se montrer jalouses !

Devant la table du trente et quarante, Silas Toronthal avait oublié toutes ses appréhensions. Maintenant il ne jouait plus « de peur », mais rageusement, ou, ce qui est plus exact, comme un homme qui ne doit pas tarder à s’emballer. Peut-on dire, d’ailleurs, qu’il y ait manière de jouer, manière « d’engager son argent ? » Non, évidemment, quoique prétendent les habitués de jeux, puisqu’on est à la merci du hasard. Le banquier jouait donc sous l’œil de Sarcany, dont l’intérêt était double en cette partie suprême, et quelle qu’en fût l’issue.

Durant la première heure, les alternatives de perte et de gain furent à peu près égales. Toutefois, la balance finit par pencher du côté de Silas Toronthal.

Sarcany et lui se crurent alors sûrs du succès. Ils « s’excitèrent », comme on dit, ils ne procédèrent plus qu’à coups de maximum. Mais bientôt l’avantage revint à la banque, dont le sang-froid est imperturbable, qui ne connaît pas les folies de l’emportement, et dont ce maximum, imposé aux joueurs,