Page:Verne - Michel Strogoff - Un drame au Mexique, 1905.djvu/235

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Alcide Jolivet et son compagnon ne pouvaient assister à un pareil spectacle sans éprouver une véritable indignation.

« C’est lâche ! Partons ! dit Alcide Jolivet.

— Non ! répondit Harry Blount. Il faut tout voir !

— Tout voir !… Ah ! s’écria soudain Alcide Jolivet, en saisissant le bras de son compagnon.

— Qu’avez-vous ? lui demanda celui-ci.

— Regardez, Blount ! C’est elle !

— Elle ?

— La sœur de notre compagnon de voyage ! Seule et prisonnière ! Il faut la sauver…

— Contenez-vous, répondit froidement Harry Blount. Notre intervention en faveur de cette jeune fille pourrait lui être plus nuisible qu’utile. »

Alcide Jolivet, prêt à s’élancer, s’arrêta, et Nadia, qui ne les avait pas aperçus, étant à demi voilée par ses cheveux, passa à son tour devant l’émir sans attirer son attention.

Cependant, après Nadia, Marfa Strogoff était arrivée, et, comme elle ne se jeta pas assez promptement dans la poussière, les gardes la poussèrent brutalement.

Marfa Strogoff tomba.

Son fils eut un mouvement terrible que les soldats qui le gardaient purent à peine maîtriser.

Mais la vieille Marfa se releva, et on allait l’entraîner, lorsqu’Ivan Ogareff intervint, disant :

« Que cette femme reste ! »

Quant à Nadia, elle fut rejetée dans la foule des prisonniers. Le regard d’Ivan Ogareff ne s’était pas arrêté sur elle.

Michel Strogoff fut alors amené devant l’émir, et là, il resta debout, sans baisser les yeux.

« Le front à terre ! lui cria Ivan Ogareff.

— Non ! » répondit Michel Strogoff.

Deux gardes voulurent le contraindre à se courber, mais ce furent eux qui furent couchés sur le sol par la main du robuste jeune homme.

Ivan Ogareff s’avança vers Michel Strogoff.

« Tu vas mourir ! dit-il.

— Je mourrai, répondit fièrement Michel Strogoff, mais ta face de traître, Ivan, n’en portera pas moins et à jamais la marque infamante du knout ! »