Page:Verne - Michel Strogoff - Un drame au Mexique, 1905.djvu/370

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gnole et d’un nègre ; le monisque, né d’une mulâtresse et d’un Espagnol ; l’albino, né d’une monisque et d’un Espagnol, le tornatras, né d’un albino et d’une Espagnole ; le tintinclaire, né d’un tornatras et d’une Espagnole ; le lovo, né d’une Indienne et d’un nègre ; le caribujo, né d’une Indienne et d’un lovo ; le barsino, né d’un coyote et d’une mulâtresse ; le grifo, né d’une négresse et d’un lovo ; l’albarazado, né d’un coyote et d’une Indienne ; le chanisa, né d’une métis et d’un Indien ; le mechino, né d’une lova et d’un coyote ! »

José disait vrai, et la pureté des races, fort problématique dans ces contrées, rend fort incertaines les études anthropologiques. Mais, en dépit des savantes conversations du gabier, Martinez retombait sans cesse dans sa taciturnité première. Il s’écartait même volontiers de son compagnon, dont la présence semblait lui peser.

Deux autres torrents vinrent bientôt couper la route. Là, le lieutenant demeura désappointé en voyant leur lit à sec, car il comptait y faire désaltérer son cheval.

« Nous voici comme en calme plat, sans vivres et sans eau, lieutenant, dit José. Bah ! Suivez-moi ! Cherchons entre ces chênes et ces ormes un arbre qu’on appelle l’« ahuehuelt », et qui remplace avantageusement les bouchons de paille dont on décore les auberges. Sous son ombre, on rencontre toujours une source jaillissante, et, si ce n’est que de l’eau, ma foi, je vous dirai que l’eau, c’est le vin du désert ! »

Les cavaliers tournèrent le massif, et bientôt ils eurent trouvé l’arbre en question. Mais la fontaine promise était tarie, et on voyait même qu’elle l’avait été récemment.

« C’est singulier, dit José.

— N’est-ce pas que c’est singulier ! fit Martinez en pâlissant. — En route, en route ! »

Les voyageurs n’échangèrent plus un mot jusqu’à la bourgade de Cacahuimilchan. Là, ils délestèrent un peu leurs mochillas. Puis, ils se dirigèrent vers Cuernavaca en s’enfonçant dans l’est.

Le pays se présentait alors sous un aspect extrêmement abrupt, et faisait pressentir les pics gigantesques dont les cimes basaltiques arrêtent les nuages venus du grand Océan. Au détour d’un large rocher apparut le fort de Cochicalcho, bâti par les anciens Mexicains, et dont le plateau a neuf mille mètres carrés. Les voyageurs se dirigèrent vers le cône immense qui en forme la base et que couronnent des rochers oscillants et des ruines grimaçantes.

Après avoir mis pied à terre et attaché leurs chevaux au tronc d’un orme,