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Page:Verne - Mirifiques aventures de Maître Antifer, 1894.djvu/18

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« Rien ?… demanda-t-il.

— Rien, Excellence… » fut-il répondu.

Un mouvement des épaules annonçant quelque dépit, termina cette conversation qui avait tenu en trois mots. Puis, le personnage, auquel le capitaine venait de donner cette qualification honorifique, redescendit l’escalier du capot et regagna sa chambre. Là, étendu sur un divan, il sembla s’abandonner à une sorte de torpeur. Bien qu’il fût immobile comme si le sommeil eût été en possession de tout son être, il ne dormait pas cependant. On sentait qu’il devait être sous l’obsession d’une idée fixe.

Ce personnage pouvait avoir une cinquantaine d’années. Sa taille élevée, sa tête forte, sa chevelure abondante, grisonnante déjà, sa large barbe se ramifiant sur sa poitrine, ses yeux noirs animés d’un regard vif, sa physionomie fière mais visiblement attristée — découragée plutôt, — la dignité de son attitude, indiquaient un homme de noble origine. Son costume, impossible de le reconnaître. Un large burnous, de couleur brune, soutaché aux manches, frangé de paillettes multicolores, l’enveloppait des épaules aux pieds, et sa tête était coiffée d’un bonnet verdâtre à gland noir.