Page:Verne - Mirifiques aventures de Maître Antifer, 1894.djvu/30

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quel il s’appuyait. La tête fixe, il ne songeait qu’à ce point observé dans le vague du crépuscule. Des doutes lui venaient à présent, de ces doutes que l’obscurité rend plus obsédants. Ne s’était-il pas laissé prendre à une illusion ? Était-ce vrai qu’un nouvel îlot eût émergé à cette place ? Oui… certainement. Ces parages, il les connaissait pour les avoir cent fois parcourus… Le point lui avait donné sa position à un mille près, et huit ou dix lieues le séparaient des terres les plus rapprochées… Mais, s’il ne s’était point trompé, si, en cet endroit, une île était sortie des entrailles de la mer, ne se pouvait-il qu’elle fût occupée déjà ?… Quelque navigateur n’y avait-il pas planté son pavillon ?… Les Anglais, ces chiffonniers de l’Océan, ont vite fait de ramasser un îlot qui traîne sur les routes maritimes et de le jeter dans leur hotte !… Un feu n’allait-il pas luire, qui indiquerait une prise de possession ?… Il était possible que la naissance de cet amas rocheux remontât à quelques semaines, à quelques mois, et comment eût-il échappé au regard des marins, au sextant des hydrographes ?…

De là, au milieu de cette fluctuation d’inquiétudes, le désarroi du capitaine, et son im-