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Page:Verne - Mirifiques aventures de Maître Antifer, 1894.djvu/74

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se déchaînait à sa base une de ces marées d’équinoxe, qui montent de cinquante pieds et couvrent d’écume la moitié de la ville.

Nanon, veuve Le Goât, quarante-huit ans, était la sœur de notre bruyant marin. Son mari, un simple terrien, comptable dans la maison Le Baillif, mort jeune, lui avait laissé une fille, Énogate, dont s’était chargé l’oncle Antifer, lequel remplissait consciencieusement et disciplinairement ses fonctions de tuteur. Nanon était une brave femme, aimant son frère, tremblant devant lui et se courbant sous les bourrasques.

Énogate, charmante avec ses cheveux blonds, ses yeux bleus, sa fraîche carnation, sa physionomie intelligente, sa grâce naturelle, plus résolue que sa mère, tenait quelquefois tête à son terrible tuteur.

Celui-ci l’adorait d’ailleurs et entendait qu’elle fût la plus heureuse des filles de Saint-Malo comme elle en était l’une des plus belles. Mais peut-être avait-il une manière de comprendre le bonheur qui n’allait point à sa nièce et pupille.

Les deux femmes apparurent sur le seuil de la chambre, l’une avec ses longues aiguilles