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épave vivante.

Ce bruit s’étant répandu à travers la ville, la population se massa partie sur les quais, partie à la pointe Island et à la pointe Loma.

Mrs. Branican, M. William Andrew, joints à quelques amis, ayant hâte d’entrer en communication avec le Dolly-Hope, s’embarquèrent sur un remorqueur pour se porter au-devant de lui. La foule était dominée par on ne sait quelle inquiétude, et, lorsque le remorqueur rangea le dernier wharf pour sortir du port, il n’y eut pas un cri. Il semblait que si le capitaine Ellis eût réussi dans cette seconde campagne, la nouvelle en aurait déjà dû courir le monde entier.

Vingt minutes plus tard, Mrs. Branican, M. William Andrew et leurs compagnons accostaient le Dolly-Hope.

Encore quelques instants, et chacun connaissait le résultat de l’expédition. C’était à la limite ouest de la mer de Timor, sur l’île Browse, que s’était perdu le Franklin… C’était là qu’avaient trouvé refuge les survivants du naufrage… C’est là qu’ils étaient morts !

« Tous ?… dit Mrs. Branican.

— Tous ! » répondit le capitaine Ellis.

La consternation était générale, lorsque le Dolly-Hope vint mouiller au milieu de la baie, son pavillon en berne, signe de deuil — le deuil des naufragés du Franklin.

Le Dolly-Hope, parti de San-Diégo le 3 avril 1882, y revenait le 27 mars 1883. Sa campagne avait duré près de douze mois — campagne au cours de laquelle les dévouements ne fléchirent jamais. Mais elle n’avait eu d’autre résultat que de détruire jusqu’aux dernières espérances.

Pendant les quelques instants que Mrs. Branican et M. William Andrew étaient restés à bord, le capitaine Ellis avait pu sommairement leur faire connaître les faits relatifs au naufrage du Franklin sur les récifs de l’île Browse.

Bien qu’elle eût appris qu’il n’existait aucun doute à l’égard du capitaine John et de ses compagnons, Mrs. Branican n’avait rien perdu de son attitude habituelle. Pas une larme ne s’était échappée de ses