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les six jours qui suivent.

deux noirs qui gardaient l’embarcation, il avait fait égorger ces malheureux dont les cris ne purent être entendus au milieu du tumulte des assaillants. Puis l’Espagnol avait attendu que Zermah se montrât, et la petite Dy un peu après elle. Les voyant seules, il dut penser que ni Mme Burbank ni son mari, ni ses amis, ne s’étaient encore décidés à fuir Castle-House. Donc, il fallait se contenter de cette proie, et il avait enlevé l’enfant et la métisse pour les conduire en quelque retraite inconnue où il serait impossible de les retrouver !

Et de quel coup plus terrible le misérable aurait-il pu frapper la famille Burbank ? Ce père, cette mère, les eût-il fait souffrir davantage, s’il leur eût arraché le cœur !

Ce fut une horrible nuit que passèrent les survivants de Camdless-Bay. Ne devaient-ils pas craindre, en outre, que les assaillants songeassent, à revenir, plus nombreux ou mieux armés, afin d’obliger les derniers défenseurs de Castle-House à se rendre ? Cela n’arriva pas, heureusement. Le jour reparut sans que James Burbank et ses compagnons eussent été mis en alerte par une nouvelle attaque.

Combien il aurait été utile, cependant, de savoir à quel propos ces trois coups de canon avaient été tirés la veille, et pourquoi les assaillants s’étaient repliés, alors qu’un dernier effort, — un effort d’une heure à peine, — leur eût livré l’habitation ! Devait-on croire que ce rappel était motivé par quelque démonstration des fédéraux qui aurait eu lieu à l’embouchure du Saint-John ? Les navires du commodore Dupont étaient-ils maîtres de Jacksonville ? Rien n’eût été plus désirable dans l’intérêt de James Burbank et des siens. Ils auraient pu commencer en toute sécurité les plus actives recherches pour retrouver Dy et Zermah, s’attaquer directement à Texar, si l’Espagnol n’avait pas battu en retraite avec ses partisans, le poursuivre comme le promoteur des dévastations de Camdless-Bay, et surtout comme l’auteur du double rapt de la métisse et de l’enfant.

Cette fois, il n’y aurait pas d’alibi possible et de la nature de celui que l’Espagnol avait invoqué au début de cette histoire, quand il avait comparu, devant le magistrat de Saint-Augustine. Si Texar n’était pas à la tête de cette bande de