Page:Verne - Nord contre sud, Hetzel, 1887.djvu/269

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
263
coup de vent de nord-est.

Tout à coup, un cri se fit entendre parmi les marins que commandait un officier.

L’homme qui venait de jeter ce cri se précipita vers miss Alice.

« Mars !… Mars !… dit la jeune fille, stupéfaite de se trouver en présence du mari de Zermah, que l’on croyait noyé dans les eaux du Saint-John.

— Monsieur Gilbert !… Monsieur Gilbert ?… répondit Mars. Où est-il ?

— Prisonnier avec monsieur Burbank !… Mars, sauvez-le… sauvez-le, et sauvez son père !

À la prison ! » s’écria Mars, qui, se retournant vers ses compagnons, les entraîna.

Et tous, alors, de courir pour empêcher qu’un dernier crime fût commis par ordre de Texar.

M. Harvey et miss Alice les suivirent.

Ainsi, après s’être jeté dans le fleuve, Mars avait pu échapper aux tourbillons de la barre ? Oui ! et, par prudence, le courageux métis s’était bien gardé de faire savoir à Castle-House qu’il était sain et sauf. Aller y demander asile, c’eût été compromettre sa propre sécurité, et il fallait qu’il restât libre pour accomplir son œuvre. Ayant regagné la rive droite à la nage, il avait pu, en se faufilant à travers les roseaux, la redescendre jusqu’à la hauteur de la flottille. Là, ses signaux aperçus, un canot l’avait recueilli et reconduit à bord de la canonnière du commandant Stevens. Celui-ci fut aussitôt mis au courant de la situation, et, devant ce danger imminent qui menaçait Gilbert, tous ses efforts tendirent à remonter le chenal. Ils avaient été infructueux, on le sait, et l’opération allait être abandonnée, lorsque, pendant la nuit, le coup de vent vint relever le niveau du fleuve. Cependant, sans une pratique de ces passes difficiles, la flottille eût encore risqué de s’échouer sur les hauts fonds du fleuve. Heureusement, Mars était là. Il avait adroitement piloté sa canonnière, dont les autres suivirent la direction, malgré le déchaînement de la tempête. Aussi, avant que le brouillard eût empli la vallée du Saint-John, étaient-elles embossées devant la ville qu’elles tenaient sous leurs feux.

Il était temps, car les deux condamnés devaient être exécutés à la pre-