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p’tit-bonhomme.

Harbert et ses recors, suivaient la route qui conduit à la ferme. Raison de plus pour que notre jeune garçon voulût se hâter d’y arriver, bien que ses jambes fussent raidies par une si longue traite. Il se refusa même une halte de quelques minutes, ainsi qu’il se l’était permise à l’aller. Il marcha, il marcha sans s’arrêter. Vers deux heures après midi, il ne se trouvait plus qu’à deux milles de Kerwan. Une demi-heure après, se montrait l’ensemble des bâtiments au milieu de la vaste plaine où tout se confondait dans une immense blancheur.

Ce qui surprit tout d’abord P’tit-Bonhomme, ce fut de ne distinguer aucune fumée en l’air, et, pourtant, le foyer de la grande salle ne devait pas manquer de combustible.

De plus, un inexprimable sentiment de solitude et d’abandon semblait se dégager de cet endroit.

P’tit-Bonhomme pressa le pas, il fit un nouvel effort, il se mit à courir. Tombant et se relevant, il arriva devant la barrière qui fermait la cour…

Quel spectacle ! La barrière était brisée. La cour était piétinée en tous sens. Des bâtiments, des étables, des hangars, il ne restait que les quatre murs décoiffés de leur toiture. Le chaume avait été arraché. Il n’y avait plus une porte, plus un châssis aux fenêtres. Avait-on voulu rendre la maison inhabitable afin d’empêcher la famille d’y conserver un abri ?… Était-ce la ruine volontaire faite par la main de l’homme ?…

P’tit-Bonhomme demeura immobile. Ce qu’il éprouvait, c’était de l’épouvante. Il n’osait franchir la barrière de la cour… Il n’osait s’approcher de la maison…

Il s’y décida pourtant. Si le fermier ou l’un de ses enfants étaient encore là, il fallait le savoir…

P’tit-Bonhomme s’avança jusqu’à la porte. Il appela…

Personne ne lui répondit.

Alors il s’assit sur le seuil et se mit à pleurer.

Voici ce qui s’était passé pendant son absence.