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sept mois à cork.

dos, dans laquelle les publications étaient soigneusement disposées, et qu’une toile cirée pouvait recouvrir en cas de pluie.

C’était là une idée de P’tit-Bonhomme et point mauvaise en somme. Rien de mieux imaginé pour attirer le chaland que de montrer Birk si sérieux, si pénétré de l’importance de ses fonctions. Mais alors, adieu les courses folles, les jeux avec les chiens du voisinage ! Lorsque ceux-ci s’approchaient de l’intelligent animal, quels sourds grondements les accueillaient, quels crocs apparaissaient sous les lèvres relevées du colporteur à quatre pattes ! On ne parlait que du chien des petits marchands aux alentours de la gare. On traitait directement avec lui. L’acheteur prenait dans la corbeille le journal à sa convenance et en déposait le prix dans une tire-lire que Birk portait au cou.

Encouragé par le succès, P’tit-Bonhomme songea à étendre « ses affaires ». Au débit des journaux et des brochures, il ajouta des boîtes d’allumettes, des paquets de tabac, des cigares à bas prix, etc. Il résulte de là que Birk eut une véritable boutique sur les reins. En de certains jours, il réalisait une recette supérieure à celle de son maître, qui ne s’en montrait pas jaloux — au contraire, et Birk était récompensé de quelque bon morceau accompagné d’une bonne caresse. Ils faisaient excellent ménage, ces trois êtres, et puissent toutes les familles se sentir aussi unies que l’étaient ce chien et ces deux enfants !

P’tit-Bonhomme n’avait pas tardé à reconnaître chez Bob une intelligence vive et aiguisée. Ce boy de sept ans et demi, d’un esprit moins pratique que son aîné, mais d’humeur plus joyeuse, laissait volontiers déborder sa vivacité naturelle. Comme il ne savait ni lire, ni écrire, ni compter, il va de soi que P’tit-Bonhomme s’était imposé la tâche de lui apprendre d’abord l’alphabet. Ne convenait-il pas qu’il pût déchiffrer les titres des journaux qu’on lui demandait ? Il y prit goût et fit de rapides progrès, tant son professeur montrait de patience et lui d’application. Après les grosses lettres des titres, il passa au texte plus fin des colonnes. Puis il se mit à l’écriture et au calcul, qui lui donnèrent un peu plus de mal. Et pourtant, dans quelle mesure il profita ! Son imagination aidant, il se voyait employé de librairie, dirigeant