tant mieux qu’en parcourant les nouvelles commerciales, il remarqua une annonce ainsi conçue :
« Londonderry, 13 mars. — Après demain, 15 courant, sera mise en vente aux enchères publiques la cargaison du schooner Doris, de Hambourg, comprenant cent cinquante tonnes de marchandises diverses, pipes d’alcool, barriques de vin, caisses de savon, boucauts de café, sacs d’épices — le tout à la requête de MM. Harrington frères, créanciers, etc. »
P’tit-Bonhomme demeura pensif devant cette annonce. La pensée lui était venue qu’il y avait peut-être là une opération fructueuse à tenter. Dans les circonstances où la Doris devait être vendue, cette cargaison tomberait à vil prix. N’était-ce pas une occasion d’acheter ces divers articles de débit courant pour la plupart, ces pipes d’alcool, ces barriques de vin, qui pourraient être ajoutées au commerce d’épicerie ?… Enfin cela trotta tellement dans la tête de notre héros qu’il alla consulter M. O’Brien.
L’ancien négociant lut l’annonce, écouta les raisonnements du jeune garçon, réfléchit en homme qui ne s’engage jamais à la légère, et finalement répondit :
« Oui… il y a là une affaire… Toutes ces marchandises, si on se les procure à bon marché, peuvent se revendre avec gros bénéfice… mais à deux conditions : c’est qu’elles soient d’excellente qualité et qu’on les obtienne à cinquante ou soixante pour cent au-dessous des cours.
— Je pense comme vous, monsieur O’Brien, répondit P’tit-Bonhomme, et j’ajoute qu’on ne peut se prononcer tant qu’on n’a pas vu la cargaison de la Doris… Je partirai ce soir pour Londonderry.
— Tu as raison, et je t’accompagnerai, mon garçon, répondit M. O’Brien.
— Vous auriez cette complaisance ?…
— Oui… je veux examiner moi-même… Je m’y connais à ces marchandises-là… J’en ai acheté et vendu toute ma vie…
— Je vous remercie, monsieur O’Brien, et je ne sais comment vous prouver ma reconnaissance…