Page:Verne - Seconde Patrie, 1900.djvu/185

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

169
seconde patrie.

à la traîne, ramenèrent-elles plusieurs douzaines de ces excellents poissons qui, bouillis à l’eau salée, figureraient au déjeuner de la première relâche.

L’aspect de la côte ne se modifiait pas. Toujours une succession ininterrompue de parements calcaires ou granitiques, une haute bordure, le pied dans le sable, percée de cavernes, dans lesquelles les mugissements de la mer devaient être effroyables, lorsque les lames s’y engouffraient sous la poussée des vents du large. De ce littoral se dégageait une profonde impression de tristesse.

Cependant, à mesure que l’on descendait plus au sud, se manifestait une certaine animation, grâce au vol incessant des frégates, des fous, des mouettes, des albatros, dont les cris assourdissaient. Ils s’approchaient parfois à portée de fusil. Quelle démangeaison pour Jack, et eût-il résisté à ses instincts de chasseur, si Annah n’eût demandé grâce pour ces inoffensifs volatiles ?…

« Et puis, fit-elle observer, parmi ces albatros se trouve peut-être celui de Jenny… Quel chagrin, Jack, si vous donniez la mort à ce pauvre animal !…

– Annah a raison… ajouta Ernest.

– Toujours raison, répliqua Jack, et je promets de ne plus tirer un seul albatros tant qu’on n’aura pas retrouvé le messager de la Roche-Fumante.