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le numéro 9672.

parages du nord de l’Atlantique, au large de Terre-Neuve ou de l’Islande, l’abîme s’était refermé sur les naufragés.

C’était là une circonstance qui devait enlever tout espoir, même à qui ne voulait pas désespérer.

En effet, avec une indication, si vague qu’elle fût, on aurait pu entreprendre des recherches, envoyer un navire sur le lieu de la catastrophe, peut-être y retrouver quelques débris reconnaissables. Qui sait si un ou plusieurs survivants de l’équipage n’avaient pas atteint un point quelconque de ces rivages du continent arctique, où ils étaient sans secours, dans l’impossibilité de se rapatrier ?

Tel était le doute qui peu à peu prenait corps dans l’esprit de Sylvius Hog – doute inacceptable pour Hulda et Joël, doute que le professeur eût hésité maintenant à faire naître en eux, tant la désillusion, si probable, eût été douloureuse.

« Et cependant, se disait-il, si le document ne donne aucune indication qu’on puisse utiliser, on sait, du moins, dans quels parages la bouteille a été recueillie ! Cette lettre ne le dit pas, mais la Marine, à Christiania, ne peut l’ignorer ! N’est-ce pas un indice dont on pourrait profiter peut-être ? En étudiant la direction des courants, celle des vents généraux, en se rapportant à la date présumée du naufrage, ne serait-il pas possible ?… Enfin, je vais écrire de nouveau. Il faut que l’on hâte les recherches, si peu de chances qu’elles aient d’aboutir ! Non ! jamais je n’abandonnerai cette pauvre Hulda ! Jamais, tant que je n’en aurai pas une preuve absolue, je ne croirai à la mort de son fiancé ! »

Ainsi raisonnait Sylvius Hog. Mais, en même temps, il prenait le parti de ne plus parler des démarches qu’il allait entreprendre, des efforts qu’il allait provoquer de toute son influence. Hulda ni son frère ne surent donc rien de ce qu’il écrivit à Christiania. De plus, ce départ qui devait s’effectuer le lendemain, il se résolut à le remettre indéfiniment, ou plutôt, il partirait dans quelques jours, mais ce serait pour se rendre à Bergen. Là, il saurait de MM. Help tout ce qui concernait le Viken, il prendrait lui-même l’avis des gens de mer les plus compétents, il déterminerait la manière dont les premières recherches devraient être faites.