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le numéro 9672.

une certaine valeur marchande. Aussi, j’entends faire un sacrifice pour en devenir possesseur.

– On vous dit, répliqua Joël, que Hulda a déjà repoussé des propositions supérieures à tout ce que vous pourriez offrir…

– Vraiment ! s’écria Sandgoïst. Des propositions supérieures ! Et qu’en savez-vous ?

– D’ailleurs, quelles qu’elles soient, ma sœur les refuse, et j’approuve son refus !

– Ah ! çà, ai-je affaire à Joël ou à Hulda Hansen ?

– Ma sœur et moi, nous ne faisons qu’un, répondit Joël. Apprenez-le, monsieur, puisque vous semblez ne pas le savoir ! »

Sandgoïst, sans se déconcerter, haussa les épaules. Puis, en homme sûr de ses arguments, il reprit :

« Quand j’ai parlé d’un prix en échange du billet, j’aurais dû dire que j’ai à vous offrir des avantages : tels que, dans l’intérêt de sa famille, Hulda ne pourra les rejeter.

– Vraiment !

– Et maintenant, mon garçon, sachez, à votre tour, que je ne suis pas venu à Dal pour prier votre sœur de me céder ce billet ! Non ! Mille diables, non !

– Que demandez-vous alors ?

– Je ne demande pas, j’exige… je veux !…

– Et de quel droit, s’écria Joël, de quel droit, vous, un étranger, osez-vous parler ainsi dans la maison de ma mère ?

– Du droit qu’a tout homme, répondit Sandgoïst, de parler quand il lui plaît et comme il lui plaît, lorsqu’il est chez lui !

– Chez lui ! »

Joël, au comble de l’indignation, marcha vers Sandgoïst, qui, bien qu’il ne s’effrayât pas facilement, s’était vivement rejeté hors du fauteuil. Mais Hulda retint son frère, pendant que dame Hansen, la tête cachée dans ses mains, reculait à l’autre extrémité de la salle.

« Frère !… regarde-la !… » dit la jeune fille.

Joël s’arrêta soudain. La vue de sa mère avait paralysé sa fureur. Tout,