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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

goutte d’eau n’avait pénétré par les coutures bien étanches de la coque et du pont. Les pompes étaient parfaitement franches. Sous ce rapport, il n’y avait rien à craindre.

Restait donc cet interminable ouragan dont rien ne semblait devoir modérer la fureur. Si, dans une certaine mesure, Dick Sand pouvait mettre son navire en état de lutter contre la tourmente, il ne pouvait ordonner à ce vent de mollir, à ces lames de s’apaiser, à ce ciel de se rasséréner. À bord, s’il était « maître après Dieu », hors du bord, Dieu seul commandait aux vents et aux flots.


CHAPITRE XIII

terre ! terre !


Cependant, cette confiance, dont s’emplissait instinctivement le cœur de Dick Sand, allait être en partie justifiée.

Le lendemain, 27 mars, la colonne de mercure s’éleva dans le tube barométrique. L’oscillation ne fut ni brusque ni considérable : quelques lignes seulement, mais la progression parut devoir être continue. La tempête allait évidemment entrer dans sa période décroissante, et, si la mer resta excessivement dure, on put constater que le vent diminuait, en remontant légèrement vers l’ouest.

Dick Sand ne pouvait encore songer à mettre de la toile dehors. La moindre voile eût été emportée. Toutefois, il espérait que vingt-quatre heures ne s’écouleraient pas sans qu’il eût la possibilité de gréer un tourmentin.

Pendant la nuit, en effet, le vent mollit assez notablement, si on le comparait à ce qu’il avait été jusqu’alors, et le navire fut moins secoué par ces violents coups de roulis qui avaient menacé de le disloquer.

Les passagers commencèrent à reparaître sur le pont. Ils ne couraient plus le risque d’être emportés par quelque paquet de mer.

Ce fut Mrs Weldon qui, la première, quitta le carré où Dick Sand, par prudence, l’avait obligée à se renfermer pendant toute la durée de cette longue tempête. Elle vint causer avec le novice, qu’une volonté vraiment surhumaine avait rendu capable de résister à tant de fatigues. Amaigri, pâle sous le hâle de son teint, il eût dû être affaibli par la privation de ce sommeil, si nécessaire à son âge !