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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

À ce cri, tout le monde accourut sur le pont, le petit Jack, curieux comme on l’est à cet âge, Mrs Weldon, dont les épreuves allaient cesser avec l’atterrissement, Tom et ses compagnons, qui allaient enfin remettre pied sur le continent américain, cousin Bénédict lui-même, qui espérait bien recueillir toute une riche collection d’insectes nouveaux pour lui.

Seul, Negoro ne parut pas.

Chacun vit alors ce que Dick Sand avait vu, les uns très distinctement, les autres avec les yeux de la foi. Mais, de la part du novice, si habitué à observer les horizons de mer, il n’y avait pas d’erreur possible, et, une heure après, il fallait convenir qu’il ne s’était pas trompé.

À une distance de quatre milles environ dans l’est, se profilait une côte assez basse, ou, du moins, qui paraissait telle. Elle devait être dominée en arrière par la haute chaîne des Andes, mais la dernière zone de nuages ne permettait pas d’en apercevoir les sommets.

Le Pilgrim courait directement et rapidement sur ce littoral, qui s’élargissait à vue d’œil.

Deux heures après, il n’en était plus qu’à trois milles.

Cette partie de la côte se terminait dans le nord-est par un cap assez élevé, qui couvrait une sorte de rade foraine. Au contraire, dans le sud-est, elle s’allongeait comme une fine langue de terre.

Quelques arbres couronnaient une succession de falaises peu élevées, qui se détachaient alors sur le ciel. Mais il était évident, étant donné le caractère géographique du pays, que la haute chaîne de montagnes des Andes formait leur arrière-plan.

Du reste, nulle habitation en vue, nul port, nulle embouchure de rivière, qui pût servir de refuge à un bâtiment.

En ce moment, le Pilgrim courait droit sur la terre. Avec la voilure réduite dont il disposait, les vents battant en côte, Dick Sand n’aurait pu l’en relever.

En avant se dessinait une longue bande de récifs sur lesquels la mer, toute blanche, écumait. On voyait les lames déferler jusqu’à mi-falaise. Il devait y avoir là un ressac monstrueux.

Dick Sand, après être resté sur le gaillard d’avant à observer la côte, revint à l’arrière, et, sans dire un mot, il prit la barre.

Le vent fraîchissait toujours. Le brick-goélette ne fut bientôt plus qu’à un mille du rivage.

Dick Sand aperçut alors une sorte de petite anse dans laquelle il résolut de