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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

Ce fut à un pied au-dessus du niveau intérieur, par conséquent à sept pieds du sol, que Dick Sand résolut de percer un trou dans la paroi d’argile.

Si, par ce trou, on était en communication avec l’air extérieur, c’est que le cône émergeait. Si, au contraire, ce trou était percé au-dessous du niveau de l’eau au dehors, l’air serait refoulé intérieurement, et, dans ce cas, il faudrait le boucher rapidement, ou bien l’eau s’élèverait jusqu’à son orifice. Puis, on recommencerait l’expérience un pied au-dessus, et ainsi de suite. Mais si, enfin, à la partie supérieure de la calotte, on ne rencontrait pas encore l’air extérieur, c’est qu’il y avait plus de quinze pieds d’eau dans la plaine, et que tout le village des termites avait disparu sous l’inondation ! Et alors, quelle chance restait-il aux prisonniers de la fourmilière d’échapper à la plus épouvantable des morts, la mort par asphyxie lente !

Dick Sand savait tout cela, mais son sang-froid ne l’abandonna pas un instant. Les conséquences de l’expérience qu’il voulait tenter, il les avait nettement calculées. Attendre plus longtemps n’était pas possible, d’ailleurs. L’asphyxie était menaçante en cet étroit espace que chaque instant réduisait encore, dans un milieu déjà saturé d’acide carbonique !

Le meilleur outil que pût employer Dick Sand à percer un trou dans la paroi, fut une baguette de fusil, qui était munie à son extrémité d’un tire-bouchon, destiné à débourrer l’arme. En la faisant rapidement tourner, cette vis mordit l’argile comme une tarière, et le trou se creusa peu à peu. Il ne devait donc avoir d’autre diamètre que celui de la baguette, mais cela suffirait. L’air saurait bien fuser au travers.

Hercule, tenant la lanterne élevée, éclairait Dick Sand. On avait quelques bougies de rechange, et il n’était pas à craindre que, de ce chef, la lumière vînt à manquer.

Une minute après le début de l’opération, la baguette s’enfonça librement à travers la paroi. Aussitôt, il se produisit un bruit assez sourd, ressemblant à celui que font des globules d’air en s’échappant à travers une colonne d’eau. L’air fusait au dehors, et, au même moment, le niveau de l’eau monta dans le cône et s’arrêta à la hauteur du trou, ce qui prouvait qu’on l’avait percé trop bas, c’est-à-dire au-dessous de la masse liquide.

« À recommencer ! » dit froidement le jeune novice, après avoir rapidement bouché le trou avec une poignée d’argile.

L’eau était restée de nouveau stationnaire dans le cône, mais l’espace réservé avait diminué de plus de huit pouces. La respiration devenait difficile, car