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L’INTÉRIEUR D’UNE FACTORIE

Cousin Bénédict, sur qui les misères ne semblaient avoir aucune prise, marchait d’un bon pas. Comme on le laissait butiner à droite et à gauche, il ne songeait point à se plaindre. La petite troupe arriva donc à Kazonndé huit jours avant la caravane d’Ibn Hamis. Mrs Weldon fut enfermée avec son enfant et cousin Bénédict dans l’établissement d’Alvez.

Il faut se hâter de dire que le petit Jack se trouvait beaucoup mieux. En quittant la contrée marécageuse où il avait gagné la fièvre, son état s’était peu à peu amélioré, et, maintenant, il allait bien. Supporter les fatigues de la caravane, ni sa mère ni lui ne l’auraient pu sans doute. Mais, dans les conditions où s’était fait ce voyage, pendant lequel certains soins ne leur avaient point été refusés, ils se trouvaient dans un état satisfaisant, physiquement du moins.

Quant à ses compagnons, Mrs Weldon n’en avait plus eu de nouvelles. Après avoir vu Hercule s’enfuir dans la forêt, elle ignorait ce qu’il était devenu. Quant à Dick Sand, puisque Harris et Negoro n’étaient plus là pour le torturer, elle espérait que sa qualité d’homme blanc lui épargnerait peut-être quelque mauvais traitement. Pour Nan, Tom, Bat, Austin, Actéon, c’étaient des noirs, et il était trop certain qu’ils seraient traités comme tels ! Pauvres gens, qui n’auraient jamais dû fouler cette terre d’Afrique, et que la trahison venait d’y jeter !

Lorsque la caravane d’Ibn Hamis fut arrivée à Kazonndé, Mrs Weldon, n’ayant aucune communication avec le dehors, ne put en être instruite.

Les bruits du lakoni ne lui apprirent rien non plus. Elle ne sut pas que Tom et les siens avaient été vendus à un traitant d’Oujiji et qu’ils allaient partir prochainement. Elle ne connut ni le supplice d’Harris, ni la mort du roi Moini Loungga, ni rien des funérailles royales qui avaient joint Dick Sand à tant d’autres victimes. La malheureuse femme se trouvait donc seule à Kazonndé, à la merci des traitants, au pouvoir de Negoro, et, pour lui échapper, elle ne pouvait même pas songer à mourir, puisque son enfant était avec elle !

Le sort qui l’attendait, Mrs Weldon l’ignorait donc absolument. Pendant toute la durée du voyage de la Coanza à Kazonndé, Harris et Negoro ne lui avaient pas adressé une parole. Depuis son arrivée, elle ne les avait revus ni l’un ni l’autre, et ne pouvait quitter l’enceinte qui fermait l’établissement particulier du riche traitant.

Est-il nécessaire de dire, maintenant, que Mrs Weldon n’avait trouvé aucune aide dans son grand enfant, cousin Bénédict ? Cela se comprend de reste.

Lorsque le digne savant apprit qu’il n’était pas sur le continent américain,