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un drame en livonie.

lumière briller vaguement, qui faisait comme une trouée jaunâtre au rideau des brumes.

« Ce feu bouge-t-il ou ne bouge-t-il pas ?… » se demanda-t-il, en s’arrêtant près de l’un des blocs de glace qui se dressaient autour de lui.

Si le feu se déplaçait, c’est que c’était celui d’un falot porté à la main, probablement pour éclairer une ronde de douaniers en marche de nuit sur cette partie du Peipous, et il importait de ne point se trouver sur son passage.

Si ce feu ne se déplaçait pas, c’est qu’il éclairait l’intérieur de l’un des postes de la rive, car, à cette époque, les pêcheurs n’ont point encore réintégré leurs cabanes, attendant la débâcle qui ne commence guère avant la seconde quinzaine d’avril. La prudence conseillait donc de prendre direction à droite ou à gauche, afin de ne point se montrer en vue dudit poste.

Le fugitif obliqua vers la gauche. De ce côté, autant qu’on en pouvait juger à travers la brume qui se levait au souffle de la brise du matin, les arbres paraissaient plus serrés. En cas de poursuite, peut-être rencontrerait-il là d’abord quelque refuge, ensuite quelque facilité pour fuir.

L’homme avait fait une cinquantaine de pas lorsqu’un sonore « qui vive ? » éclata sur sa droite.

Ce « qui vive ? » prononcé avec un fort accent germanique, qui ressemblait au « verda » allemand, produisit la plus désagréable impression sur celui auquel il s’adressait. D’ailleurs, la langue allemande est la plus employée, sinon par les paysans, du moins par les citadins des provinces Baltiques.

Le fugitif ne répondit point au « qui vive ? » Il se jeta à plat ventre sur la glace et fit bien. Une détonation retentit presque aussitôt, et, sans cette précaution, une balle l’eût frappé en pleine poitrine. Mais échapperait-il à la ronde des douaniers ?… Ceux-ci l’avaient aperçu, nul doute à cet égard… Le cri et le